22/04/2013

Oxmo Puccino, cet humble poète charismatique


La tournée d'Oxmo Puccino s'est arrêtée ce samedi 20 avril 2013 à la salle André Malraux de Six-Fours (83). Retour sur la prestation d'un artiste, d'un poète... que dis-je ? D'un maître, jonglant avec les mots depuis tant d'années.

Les lumières s'éteignent. Deux spots s'allument et se braquent sur un fauteuil (le trône du roi sans carrosse ?). Située au milieu de la scène, entre ses musiciens, la place du grand maître ne restera pas vide très longtemps. Une grande silhouette s'avance alors sur scène et prend place. Oxmo Puccino est assis et contemple ses élèves l'applaudir. Le maître peut commencer son cours.


L'Homme en impose

Rares sont les artistes m'ayant autant impressionné. Oxmo Puccino prend son micro, se lève et s'avance sur scène pour saluer son public avant de donner le "la" à ses musiciens. Au détour d'un couplet son regard croise le mien. Intimidé je lui lance un grand sourire (idiot). L'instant d'une fraction de seconde j'avais l'impression d'avoir fait un bon de dix ans en arrière. L'image d'un gosse devant son idole ou tout du moins, un élève devant son maître écoutant son cours de littérature (ou de poésie) ce soir là.

Le maître d'école a parlé

À chacune de ses interludes Oxmo Puccino ne peut s'empêcher de raconter une anecdote sur le titre qu'il a, ou qu'il va interpréter. Chaque mot, chaque parole est analysée. J’emmagasine tout ce que l'artiste dit. Tout ce qu'il chante. Les paroles de ses chansons sont multipliées par trois. Le fait de savoir que l'Homme à qui la légion des arts et des lettres a été décernée est devant moi, m'impressionne. Un peu comme si j'avais oublié d'apprendre ma leçon avant d'arriver en cours. Mais mes classiques je les connais : J'ai mal au mic, Masterciel, 365 jours, Mama Lova, Où est Billie ?, ou encore le vieux Cactus de Sibérie. Ma note s'annonce pas si catastrophique en fin de compte.

Un cours de poésie

La force d'Oxmo Puccino ? Ses textes. Et raison de plus quand il les pose accapela. Premier rappel. L'artiste (re)prend le mic et se place au centre de la scène. Un silence envahit alors la salle. Mes oreilles sont grandes ouvertes pour écouter comme il se doit le professeur. L'homme au grand cœur nous raconte alors son lien avec l'Unicef et son voyage en Afrique (qu'il conseil à tous) pour se reconstruire. Avec pour seule arme sa voix, il entame alors le premier refrain de Naître Adulte. C'est, dans ce silence absolu, que j'ai pris une claque et compris pourquoi ce mec est un poète des temps modernes. Il impose le respect et avec la plus grande humilité, étale son talent de songwritter.


Le maître des mots et des rimes qui s'est présenté à moi ce soir m'a tétanisé de joie. Cet artiste manie la langue française avec une extrême délicatesse et un immense respect. Soigne son écriture, respecte les règles de la poésie. Jongle avec les mots comme on enfile des perles. Oxmo Puccino ne rappe pas. Il raconte des histoires. Ce soir le professeur « Black Jacques Brel » a parlé. Promis, la prochaine fois j'apprendrais ma leçon.

Chilly Gonzales : Un entertainer de grand talent !

Quinze années de tournée et jamais Chilly Gonzales n'avait foulé le sol varois. Ce dimanche 21 avril 2013, c'est chose faite. Le compositeur aux doigts d'or (et d'argent !) a offert un Solo Piano 2, à l'espace Malraux de Six-Fours, de grand standing.

Chilly Gonzales n'est pas un pianiste comme les autres. La normalité (mot à la mode en ce moment), ça l'fait chier. Il se pointe sur scène en robe de chambre et pantoufle. Oui Monsieur ! Après tout, ça n'enlève rien à son talent et sa mèche folle. La preuve en est avec ces deux heures passées en sa compagnie.


L'artiste laisse parler son talent durant les 45 premières minutes. Il est impressionnant de maîtrise et d'aisance. Chilly Gonzales ne fait qu'un avec les touches de son piano. En totale osmose. J'ai bien l'impression que j'allais assister à un concert de piano ordinaire. Que nenni. C'était sans compter sur le personnage et son goût immodéré pour l'auto-dérision. C'est alors qu'il entame une leçon de solfège. Cela peut paraître ennuyant, mais après ses quelques explications, le personnage se dessine petit à petit sous mes yeux. Ce mec est vraiment atypique et surtout grande gueule.

« Fuck Arpeggios ! »

Tout le monde en prend pour son grade. Même les artistes avec lesquels (il a) il collabore. Des Daft Punk en passant par Sebastien Tellier. Steve Jobs à qui il doit tout comme il le dit si bien (avec cette pointe d'humour qui le caractérise tant). Le grand Mozart passe aussi au broyeur. Leur point commun ? L'ARPÈGE. Il nous expliquera pendant près d'un quart d'heure ce que c'est, tout en mettant en application ses arguments. « Vous croyez qu'il font quoi les français masqués ? (ndlr : Daft Punk). Et bien, ils appuient ni plus ni moins sur une touche « arpège » et font des tubes ! » Chilly Gonzales crache dans la soupe. Mais qu'est ce que c'est bon d'entendre tout ces artistes se faire dézinguer par un mec aussi talentueux que lui ! Qui de surcroît ne se prend pas au sérieux.


« Frère Jacques, ça ressemble à l'hymne du FN ! »

Chilly Gonzales ne cessera de partager sa passion pour la musique. Reviendra même sur son passé et ses premières leçons de piano. Avant d'échanger quelques notes avec des jeunes de la salle. Une leçon de piano par Chilly Gonzales, faut avouer que ça a de la gueule. Non ? Toujours dans son personnage, l'artiste continuera de descendre les artistes et les monarchies pour leurs goûts invétérés des « notes sans âmes ». Nous aurons alors le droit à un nouveau cours, tout en humour, sur les notes majeures (joyeuses) et mineures (tristes). C'est à mourir de rire mais tellement vrai. Avant de demander au public quels titres voudrait-il qu'il joue. Et qu'un beauf gueule : « Ton nouveau featuring avec Daft Punk » (il fallait bien qu'il y en ait qui l'a fasse). Gonzales s'exécute. Tous les téléphones enregistrent alors, ce qui s'apparentera de nouveau à un fake (à coup sûr). Il ne manque pas d'humour ce Gonzales !

Ce soir là j'ai assisté à une démonstration de talent mêlée d'humour et d'auto-dérision. Chilly Gonzales ne veut absolument pas tomber dans la banalité et innove constamment pour trouver de nouvelles sonorités. A l'image de son titre White Keys, pour lequel il s'est forcé d'utiliser uniquement les touches blanches comme son nom l'indique. Chilly Gonzales est aussi un gros produit marketing (à son inssu?) et ne s'en cache pas. Après les premières notes de Gogol, il ironisera en déclarant : « Et en plus j'me suis fait beaucoup d'argent ! (rire)». Un entertainer de grand talent.

13/04/2013

James Blake - Overgrown // Surprend nous dorénavant !


Partagé entre le sentiment d'avoir déjà entendu ça il y a deux ans. Et le sentiment que de toute façon, tout ce que touche James Blake se transforme en or. Cependant l'attente a été si longue, que je n'ai reculé devant rien quand est venue l'heure d'écouter, Overgrown, nouveau disque offert par l'artiste.


C'est désormais le deuxième opus de James Blake. Autant dire les choses, c'est une nouvelle réussite ! Surpris ? Non ! (là est bien le problème) Tout comme l'écoute de ses compositions d'ailleurs. L'effet de surprise à l'écoute de chacune de ses productions est nul. Vocalises/piano pour la grande majorité d'entres elles (toujours avec quelques sanglots dans la voix). Mon écoute s'est alors penchée sur son talent de compositeur.

Même recette, mais comment lui en vouloir ?

Dur de reprocher à un tel artiste de reproduire la recette qui a fait de son premier album un classique. Malgré tout, le désir, le plaisir et l'envie de dévorer ce nouveau bijou est intact. James Blake manie avec toujours autant de dextérité son piano. A croire que le sens de la mélodie est inné chez lui. Les productions sont léchées et le mélange des genres tout aussi bien trouvé. Le tout magistralement orchestré. RZA aux côtés de James Blake. L'association a de quoi surprendre. On crierait presque au scandale. Et pourtant ce titre fait partie des perles de Overgrown. James Blake a le don de mettre nos nerfs à rude épreuve. C'est énervant d'assister impuissant à un déferlement de perfection auditive !



Ce pouvoir de compositeur

Sur Dlm James Blake met en avant toute la pureté de ses cordes vocales sur quelques notes de piano (ça change). On s'en fout, on aime ça. Mais le plus de cet artiste réside dans son talent de composition. Tout juste le temps de se faire envouter par cette voix devenue si singulière, qu'il nous bascule dans un tout autre monde. Le rythme change et nous embarque dans la folie avec Digital Lion, et évite ce sentiment d'ennui que l'on pourrait avoir après quelques minutes (ex : Voyeur). Une force de composition de nouveau très présente et fascinante quand on la décrypte. La froideur de To The Last et sa basse ronflante nous berce comme pour Our Love Comes Back. Toujours autant d'émotion, même si certains de ses soubresauts en deviennent barbant à la longue.


Le talent de compositeur de James Blake est incontestable. Et se confirme une seconde fois grâce à Overgrown. Cette capacité à rebondir constamment et relancer un album grâce à des titres comme
Take A Fall For Me (feat.RZA) et Every Day I Ran est époustouflante et plus que convaincante. Mais plus rien ne nous surprend venant de lui (problème ?). À l'avenir James Blake devrait changer son fusil d'épaule et moins mettre en avant cette voix qu'on lui connaît déjà trop. C'est un peu comme dans un couple. Toujours entretenir la flemme... Alors, surprend-nous dorénavant !